Skye ♦ What can I do for you, Sir ?

Copyright : Lena / LETHAL ANGEL / Lena

▬ Félicitation, c'est une fille !

Le jour de ma naissance, je ne m'en souviens plus. Tout ce que je sais sur le 5 février 1990, je l'ai su par ma grand-mère, qui m'a raconté ce qui s'était passé ce jour-là. Ma mère avait, paraît-il, un énorme sourire sur le visage. Le sourire d'une femme heureuse et épanouie, disait-elle. La plupart du temps, elle me tenait dans les bras et elle acceptait rarement de me lâcher, même pour me donner à ma grand-mère. Mon père n'était pas là ce jour-là; il travaillait, comme souvent. Comme trop souvent. Il était le directeur d'une grande entreprise connue mondialement et passait le plus clair de son temps à son bureau. Ma mère, elle, était un médecin réputé, spécialisé en ophtalmologie. En effet, on peut dire que je suis née une famille de bonne condition. Née à Buenos Aires, ma famille était issue d'un milieu riche, ce qui n'est pas commun ici, en Argentine.
Mais revenons à nos moutons ! A cette époque-là, ma mère ne voulait pas se séparer de moi, même l'espace de deux secondes. C'était ce que ma grand-mère m'avait dit et, la connaissant, je savais qu'elle disait la vérité, aussi dure à croire soit-elle, car ma grand-mère ne mentait jamais. Elle m'avait également aussi beaucoup parlé de la rencontre de mes parents, de leur histoire avant ma naissance. Ils s'étaient rencontré totalement par hasard, à Londres, ville où ma grand-mère était née et avant grandit. Ma mère était ici pour les vacances; elle avait décidé de visiter le pays de ses origines. Quant à mon père, il s'y était rendu pour les vacances. Ce dernier aborda ma génitrice pour lui demander un renseignement, et ils se quittèrent, ne sachant rien l'un de l'autre. Le hasard les réuni à nouveaux plusieurs années plus tard, à Buenos Aires, où ils habitaient tous les deux et ce fut là le début d'une histoire. Ils finirent par se marier et voilà où ils en sont aujourd'hui. Alethea Saphyr, leur fille, est venue au monde.



L'attachement que ma mère avait pour moi à ma naissance ne dura pas : une fois que je n'eus plus besoin d'être allaitée, elle reprit son travail et m'abandonna complètement, me laissant à la charge de ma grand-mère, qui vivait chez nous depuis la mort de mon grand-père. C'était ma grand-mère qui m'éduquait, qui me grondait lorsque je faisait une bêtise. C'était elle qui me soignait lorsque je me faisais mal, qui m'emmenait au parc les week-end. Je passais énormément de temps avec ma grand-mère et je l'adorais. Elle me racontait beaucoup d'anecdotes sur son enfance, sur celle de ma mère... J'aimais beaucoup passer du temps à l'écouter. Cela pouvait paraître bizarre, mais je ne considérais pas ma mère comme telle. Celle que je considérais de cette manière-là, c'était ma grand-mère, étant donné qu'elle s'occupait de moi depuis toujours. Cependant, je n'étais pas dupe; je savais que ma grand-mère finirait par s'éteindre comme l'avait fait mon grand-père, une dizaine d'année avant ma naissance. Son état commençait d'ailleurs peu à peu à se dégrader, jusqu'à mes treize ans, où elle fut clouée sur un lit d'hôpital. J'étais seule chez moi à présent. Mon père était toujours autant occupé à son bureau - d'ailleurs, même si je n'avais que neuf ans, quelque chose me disait que sa secrétaire y était pour quelque chose... - et ma mère ne rentrait qu'à la fermeture de son cabinet - vers 18-19h. Bien entendu, il y avait les domestiques, mais ce n'était pas pareil. Ce n'était pas comme avec ma grand-mère. Je lui rendais régulièrement visite à l'hôpital, mais je ne supportais pas de la voir dans cette salle toute blanche, reliée à pleins d'appareils.
Puis, le jour fatidique arriva. Moins d'un an après son hospitalisation, ma grand-mère, celle qui m'avait tant donné, décéda. Inutile de dire que j'ai passé plusieurs nuits, plusieurs jours à pleurer. Je ne comprenais pas. Pourquoi elle ? Pourquoi m'avait-on enlevé celle à laquelle je tenais le plus ? La seule qui semblait bien vouloir de moi dans cette famille était à présent partie. Et elle ne reviendrait plus.



L'adolescence fut une période difficile pour moi. Tout d'abord parce que j'ai eu du mal à me remettre de la mort de ma grand-mère et mes parents ne faisaient toujours pas attention à moi, comme je l'avais toujours souhaité. Ils auraient pu me donner un petit frère ou une petite sœur, histoire que je ne me sente pas seule à la maison. Mais non, j'étais fille unique et ils ne voulaient pas d'autre enfants, prétextant qu'il était déjà difficile de s'occuper d'un seul enfant. Ironique, sachant qu'ils ne se sont jamais comportés en parents envers moi.
A à peine quinze ans, j'entrais dans le monde de la fête. Tous les week-end, je sortais - parfois même en semaine. Je buvais, je fumais. Peut-être mon inconscient voulait-il attirer l'attention de mes parents sur ma solitude, mais en tous les cas, ça ne marcha pas; ils fermaient les yeux, faisaient comme si rien ne se passait. Car j'ai oublié de vous le dire : notre famille se faisait passé pour "la famille parfaite" dans le quartier. Tous les voisins nous enviaient et ne voyaient pas ce qu'il se passait dans notre maison. Ils ne voyaient pas à quel point on s'éloignaient les uns des autres dans cette famille. Donc, une ado qui ne passe plus un week-end sobre ? Il vallait mieux que cela ne se sache pas ! Fermer les yeux étaient la meilleur chose à faire pour eux. Fermer les yeux et ignorer mon mal-être.
Enfin bref, c'est également à cet âge-là que je goûtais pour la première fois aux plaisirs charnels. Je ne connaissais même pas celui qui me déflora. Je l'avais rencontré ce soir-là et nous avions sympathisé. Et de fil en aiguille, je m'étais finalement retrouvée dans son lit. Je n'étais pas rentrée chez moi de la nuit, et mes parents ne semblaient même pas s'en inquiéter : lorsque je rentrais chez moi le lendemain matin, ils étaient déjà partis au travail, sans un mot, ni une petite attention pour moi. Au fond, je crois que c'est à cette époque-là que je commençais à développer la haine que j'ai aujourd'hui envers mes parents, ces êtres grâce auxquels je suis né, mais qui n'ont pourtant pas su s'occuper de moi comme il le fallait.



Et puis, à mes dix-huit ans, je pétais un plomb. J'en avais marre de cette "famille" - si l'on pouvait appeler ça comme ça. Ca aurait pu être un vendredi comme les autres, un vendredi soir durant lequel je serais sortie avec mes amis. Mais mes parents avaient tenus à faire un dîner en famille et j'avais décidée de me pliée à leur souhait, pensant naïvement qu'ils voulaient peut-être vraiment former une famille. Mais, j'étais loin de la vérité.

▬ Alethea, il faut qu'on parle, avait dit ma mère.

Je grimaçais en entendant mon prénom. Cela faisait longtemps que je ne l'avais pas entendu. Mes amis m'appelaient Skye, pas Alethea, et cela faisait longtemps que je n'avais plus parlé à mes parents. De plus, le ton qu'avait utilisé ma mère ne me rassurait pas vraiment. Je me demandais ce qu'elle voulait dire. J'avais peur de ce qu'elle puisse dire en fait.

▬ Nous avons pris une décision avec ton père. Tes notes sont en chute libre, tu ne pourras pas entrer dans l'université de ton choix si tu continues comme cela. Nous aimerions donc que tu arrêtes de sortir.

Je regardais tour à tour mes parents, bouche bée. Ils n'avaient quand même pas l'intention de me faire rester seule toute la journée chez moi pour étudier ? Je n'en serais pas capable. J'avais besoin de sortir, de voir du monde. Je ne pouvais pas simplement rester entre quatre murs à me concentrer sur mes cahiers. Et puis l'université de mon choix ? C'était eux qui l'avaient choisi à ma place - la seule chose qu'ils faisaient pour moi, c'était me dicter quel métier je devrais faire, avec qui je devrais me marier... Afin de former moi aussi, une "famille parfaite". Je serais avocate, mariée avec le fils du voisin - qui faisait des études de médecine. Comme si j'en avais envie ! Je me levais de table et regarda ma mère avec un air de défi dans les yeux :

▬ Sinon quoi ? Tu vas me cloîtrer dans ma chambre ? Difficile de vérifier que j'y sois bien étant donné que tu n'es jamais à la maison ! Et puis ces études, tu peux te les mettre ou je pense ! Tu crois que ça m'intéresse le droit ? Non pardon, je reformule : sais-tu au moins ce que j'aime, ce que je n'aime pas ? Non, bien sûr que non. Tu ne me connais pas ! Nous sommes peut-être liés par le sang, mais émotionnellement, nous ne sommes rien l'une envers l'autre !

Une fois que je lui eu dit tout ce que je pensais, je m'arrêtais de parler, histoire de lui laisser au moins une chance de répondre à mes attaques. Cependant, il n'en fut rien.

▬ C'est bon, tu as fini ton cinéma ?

Ce fut tout ce qu'elle était capable de répondre. Et ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Je repoussais mon assiette à peine entamée vers le milieu de la table, faisait comprendre que je ne la finirais pas et je me retournais, prête à partir.

▬ Alethea ! Alethea, nous n'avons pas fini de manger ! Reviens t'asseoir à table ! Où sont donc passées tes bonnes manières ?
▬ Mes bonnes manières, ça fait longtemps que je les ai perdues. Tu vois, tu ne me connais pas. Je m'en vais.

Je filais dans ma chambre et je remplis ma valise de vêtements, d'argent et d'autres choses utiles. Puis je redescendit sous les yeux de mes parents, jusqu'au garage où je mis mes affaires dans ma voiture. Je mis le contact et je parti. Mes parents n'essayèrent même pas de m'en empêché, un peu comme si ça les soulageait que je partais. Alethea l'argentine était morte. Elle avait donné naissance à Skye l'américaine. Les Etats-Unis m'avaient toujours fait rêver, et c'était là-bas que je me dirigeais.

Ce pendant, le rêve américain ne dura pas. Je trouvais un boulot dans un petit restaurant, un studio à Miami... Cependant, il me manquait quelque chose. Je ne m'amusais plus, la vie était trop banale. Et puis un jour, j'entendis le nom de Mydhriss dans une conversation entre deux hommes, sur mon lieu de travail. Remplie de curiosité, je me décidais à aller voir ce qu'il se passait-là-bas. D'après la conversation des hommes, cet endroit avait l'air parfait pour faire la fête. Parfait pour moi, donc. Peut-être trouverais-je là-bas un moyen de sortir de ma routine ?



Voilà à présent sept mois que je suis sur Mydhriss, où je suis Escort Girl, un métier qui me correspond à merveille, sachant mon amour pour ce monde-ci. Cependant, depuis quelque temps tout est différent. Je suis depuis plus d'un mois avec mon mac, Owen. Je suis vraiment amoureuse de lui, mais cela a des répercussions négatives, autant sur mon travail que sur ma vie privée. Tout d'abord, parce que j'éprouve des remords à aller voir ailleurs et j'ai de moins en moins envie de continuer mon boulot - même si je me force quand même à le faire. Ensuite, parce qu'Owen est du genre jaloux et que justement, il supporte très mal mon travail; il n'hésite pas à me le faire comprendre avec violence. Ne cherchez plus, si j'ai un bleu c'est sans doute à cause de lui. Mais je l'aime, et je me fiche de toutes les blessures physiques qu'il peut m'imposer tant qu'il ne me brise pas en me quittant.
Le seul truc qui me gêne, c'est que moi, je n'ai rien le droit de lui dire alors que je sais très bien que d'autres Escort Girls ou Purpose Girl finissent régulièrement dans son lit...